Depuis l’Antiquité, toute l’histoire de l’esthétique et de la réflexion philosophique portant sur la musique est marquée par un antagonisme profond. L’une des approches accentue les caractéristiques dites « formelles », mesurables et objectives des phénomènes musicaux, tandis que l’autre tient compte de l’expression, du rôle social, de la valeur communicative des oeuvres musicales.
De nos jours on constate le retour de la discorde. La musicologie actuelle peut être considérée comme la scène d’un champ de bataille acharnée entre deux forces antinomiques : celle des représentants du formalisme musical contemporain, et celle qui cherche – grâce aux outils théoriques empruntés à l’évolution récente des sciences humaines – à comprendre la manière dont la musique exprime ou signifie notre rapport au monde, aux unités culturelles de chaque époque historique. C’est de cette façon que les apports de la sémiotique et de la narratologie littéraire, de l’étude de l’intermédialité, des sciences cognitives, des performance studies, des gender studies, etc. peuvent féconder la réflexion actuelle sur les oeuvres musicales.
Cet ouvrage réunit vingt-trois textes de musicologues parmi les plus grands spécialistes de renommée internationale (de plusieurs pays aussi bien que français), dans le domaine de l’examen des signes musicaux (voir : théorie des topiques ou théorie de l’intonation), comme dans celui de l’organisation des éléments expressifs à l’intérieur d’une forme musicale instrumentale (voir : narratologie musicale). Une première partie aborde les questions théoriques soulevées par ces approches contemporaines, tandis que la deuxième partie de l’ouvrage se consacre aux analyses des œuvres – allant de Mozart jusqu’à la musique contemporaine de Carter, Henze, Harvey, en passant par Schubert, Chopin, Mahler – appliquant ces méthodes nouvelles. La confrontation avec le formalisme est omniprésente, permettant d’aboutir aux dépassements dialectique.